C’est l’été ! Après ces longs mois de restrictions et de confinement, ça y est, je décide de prendre pour la première fois la route vers l’extrême ouest …
Pour moi l’ouest, c’est cette région située au-delà de Quimper, dans le Finistère, là où la terre se jette dans l’océan : une sorte de terra incognita ceinte par l’Atlantique, émaillée de hautes falaises, d’ajoncs et de bruyères, de bois impénétrables, de villages isolés et de routes rectilignes longeant la côte, un pays de légendes et de contrastes, âpre un jour, tendre l’autre, et une couleur particulière entre bleu, vert et gris qu’on appelle Glaz. Des clichés ? Peut-être !
Départ immédiat
J’ai vraiment hâte d’en apprécier toutes les beautés subtiles et de me fondre dans ses paysages … Pour retrouver ce dialogue avec l’inconnu et la surprise, pour que mes à priori prennent une autre tournure, plus intime. Bref, pour retrouver l’essentiel : la nature, les gens, soi-même !
Je pars de chez moi jusqu’à Audierne en voiture. Dans ma valise, je glisse le nécessaire pour une escapade de quelques jours – sweats et chaussures de marche, appareil photo en bandoulière, sans oublier la carte du Cap-Sizun. Voilà, c’est plié !
Le lendemain de mon arrivée dans le petit port d’Audierne, direction la Pointe du Raz ! Quinze kilomètres où les arbres s’espacent de plus en plus les uns des autres, pour laisser place à une lande rase et colorée. C’est un peu comme changer de pays. On dirait qu’ici le paysage entier annonce, par sa lumière et ses herbes sauvages, l’immensité de l’océan. Primelin, l’anse du Loch, Plogoff, la Pointe du Raz. Terminus, tout le monde descend !
Après m’être garé, j’entre à l’Office de Tourisme de la Pointe du Raz. À l’accueil, un conseil avisé : pour rejoindre la pointe, prenez par le sentier côtier, ce chemin vaut le détour !
En effet, voici un belvédère lové dans une tour…
Et là, le port-abri de Bestrée…
Au cœur de la Pointe
Je poursuis mon chemin … Et soudain j’aperçois au détour du sentier une forme haute et effilée qui affleure avec force dans le bleu de l’océan. Le contraste entre les reliefs acérés de la pointe et la mer calme est saisissant, et quand le soleil inonde tout comme aujourd’hui, le paysage devient autre chose, il se nimbe d’émotion.
À cet instant, on ne pense plus à rien, l’esprit est libre !
Je fais alors une petite pause dans ma balade pour reprendre haleine, et contempler sur ce plateau de roches, les tourbillons du Raz au pied de l’à-pic, cette plaine toute bleue, infiniment grande, avec des phares et l’île de Sein, éparpillés.
Maintenant, l’horizon presque blanc palpite, suspendu entre ciel et mer.
Près de moi, j’entends « d’ici, vraiment, c’est magnifique ! »
Sur le chemin du retour
Ravi par cette halte envoûtante, je prends le chemin du retour. Au-dessus de moi le soleil suit sa course. Sous mes pieds le sentier se faufile entre les pierres et les buissons fleuris. Tout autour, ce n’est que silence et murmure : le chant dissonant des grillons, la voix d’un coucou et le vent sur ma peau.
Je jette un dernier regard en arrière pour évaluer les distances et me déprendre peu à peu de ce rêve éveillé … La statue blanche de Notre Dame des Naufragés et l’imposant sémaphore s’éloignent. Mais j’avance et là, j’aperçois la baie des Trépassés. Je connaissais déjà ce spot de surf absolu, mais la voir ici pour de vrai, c’est plutôt cool !
Monsieur Papier
En sortant du site de la Pointe du Raz, une panthère noire peinte sur une petite maison attire mon attention. Tagué juste à côté : café, vue mer. Une enseigne : Monsieur Papier. Au cours d’une longue marche, rien de mieux que d’arriver à ce genre d’endroit pour faire une pause et se rafraîchir un peu !
Dans les années 50, c’est là que les passagers prenaient leurs billets pour l’île de Sein, lorsque la liaison se faisait depuis le port-abri de Bestrée. C’est une petite maison typique, du coup, quand on entre à l’intérieur, on ne s’attend pas à cette pièce très haute contenant toutes sortes de choses : un beau comptoir en bois, des pâtisseries sous cloche, des bières, cafés d’ici et thés d’ailleurs… Une collection de livres et de vaisselle en céramique trône sur une grande table au milieu de la salle. Contre les murs, une sélection dépareillée de carnets et de cartes, semainiers, agendas, papier à lettre ou papier peint, gravures, woodentoy, carreaux de ciment et tote bags, au graphisme original.
Bref, c’est le parfait sanctuaire pour se rassasier, s’inspirer et repartir le sac rempli de belles idées made in Cap-Sizun !
Passée la véranda, je me cale dehors. Parmi les choix d’une carte où l’on vous concocte tout pour manger local et frais, je prends un café et la tarte du jour.
Vers 18h en terrasse, le soleil projette ses rayons roses sur la lande. Sur la mer, en face, des bateaux se croisent … Et moi, les doigts de pied en éventail, je goûte à la liberté !