Cet été, j’ai décidé de passer mes vacances en Bretagne et d’enfourcher mon vélo. Objectif : parcourir la fameuse véloroute La Littorale, qui longe les côtes cornouaillaises. Je vous emmène avec moi et vous fait partager mes plus belles rencontres sur le chemin. Après avoir découvert la fabrication de produits à base d’algues, j’ai cheminé sur les magnifiques routes du Cap Sizun où j’ai appris à concevoir…du whisky.
Plogoff, au bout du monde. Ses plages, sa nature à perte de vue et… sa distillerie ! Au bout d’un chemin, en retrait de la route principale, Étienne et Émilie Jacques vivent au milieu de leur grand jardin, rempli de plantes aromatiques. Installés ici depuis deux ans, ils fabriquent du whisky, gin ou encore un vespetro, une liqueur destinée à mieux digérer.
Distillateur par passion
Intriguée, je suis allée jeter un œil dans le hangar où de drôles de machines en cuivre sont entreposées. En ce mercredi matin, comme toutes les semaines, un petit groupe se rassemble autour de l’alambic, qui commence doucement à chauffer. Étienne Jacques est devenu distillateur par passion, sans suivre de formation spécifique. « Elle n’existait pas à l’époque« , se souvient-il. L’ancien salarié d’association, basé dans le Rhône-Alpes, a traversé la France pour atterrir à Plogoff, où il a acheté tout le matériel nécessaire à sa nouvelle activité. L’avantage de la région : il n’y a pas de gelée. L’idéal pour celui qui souhaite faire macérer ses propres plantes, cueillies dans le jardin.
Fabrication d’alcool interdite à la maison
Régulièrement, il organise des stages pour faire partager son savoir au plus grand nombre. Aujourd’hui, Yohan et Sylvain, un père et son fils quimpérois ont voulu découvrir les secrets de la distillation de l’alcool. A côté, Christine et Julien, un couple originaire de Mulhouse s’intéresse à la macération des fruits. Leurs parents leur ont offert le stage.
Attentif, le petite groupe observe l’étrange machine, tout droit sortie d’un autre temps. Inutile de rêver d’acheter un alambic pour distiller son propre alcool chez soi, la vente est strictement contrôlée et la fabrication interdite à domicile. Cela tombe bien, je n’avais pas l’intention de me lancer dans un whisky maison made in mon salon. D’autant que le procédé peut comporter des risques.
Le whisky distillé deux fois
Avec passion, Étienne Jacques explique les différentes étapes pour aboutir à de délicieuses boissons. Tout d’abord, il faut avoir de l’alcool. Il s’obtient en faisant macérer des céréales-de l’orge maltée pour le whisky-dans de l’eau chaude. Le sucre qui se dégage de la préparation est ensuite mélangée à une levure spéciale, dans une autre cuve. La réaction entre les deux organisme crée de l’alcool.
C’est là qu’intervient la distillation, dans l’alambic. Une première fois, le mélange alcoolisé passe dans cet outil pour séparer l’alcool de l’eau. Ensuite, Étienne distille à nouveau le résultat, pour retirer ce qu’on appelle « l’alcool de tête », qui coule en premier et « l’alcool de queue », à la fin. Le premier n’est rien d’autre que de l’alcool à brûler, toxique pour l’organisme, et le second un alcool au goût peu intense.
Malgré l’heure matinale, Étienne nous fait goûter le résultat dans de petits verres. Ma gorge, non habituée aux alcools forts, brûle. Heureusement, Étienne peut régler le dosage, en y ajoutant de l’eau.
Des macérats aux vertus thérapeutiques
En faisant cela, il nous conseille quelques lectures. Si, dans ma tête, l’alcool, surtout le fort, est associé aux abus en tous genres, Étienne a réussi à me faire comprendre que ce n’était pas toujours le cas. Comme les huiles essentielles, nos ancêtres utilisaient certaines boissons comme des médicaments. Le vespetro, par exemple, était un apéritif à base de coriandre et d’anis, destiné à faire mieux digérer. D’ailleurs, toutes les plantes et fleurs peuvent macérer dans de l’alcool, à condition qu’elles ne soient pas toxiques, bien sûr. A dose homéopathique, on peut les utiliser pour régler nos maux divers.
Après cette visite instructive, il est temps de repartir sur les routes du Cap Sizun. J’enfourche mon vélo pour reprendre la véloroute, à quelques mètres de la distillerie. La route est, sur cette portion, plate. C’est parti pour de nouvelles aventures !