Rentrer dans une librairie, flâner le long des rayonnages tout en humant cette odeur si caractéristique, et tant qu’à faire, déguster un carrot cake parfum cannelle. Une certaine gêne peut nous surprendre, n’est-ce pas ? « Est-ce que je peux juste boire un verre ? Dois-je acheter obligatoirement un livre ? Oh, celui-là j’aimerais tellement le feuilleter… ».
C’est un peu ce que j’ai ressenti lorsque je suis rentrée dans le café librairie Le Bistrot à lire, il y a dix ans, à Quimper. Mais très vite, ses hôtes m’ont mise à l’aise. Depuis, je suis addict de ces endroits insolites. Je passe souvent un très bon moment, même si je ne repars pas toujours avec un bouquin. Il me suffit d’une musique agréable diffusée, quelques mots échangés avec la table voisine, ou simplement siroter une grenadine avec ma fille.
Pour la petite histoire, ces lieux culturels ont vu le jour en Finistère dans les années 90. La première Fédération des Cafés-Librairies est créée en Bretagne en 2007. Elle est aujourd’hui implantée à Bruz sous le nom de Calibreizh. Cette association réunit 17 cafés-librairies. Elle a pour but de promouvoir artistes, musiciens et écrivains en créant des événements communs comme Thé, café et poésie au printemps, Bretagne, j’écris ton nom en été et Libres en littérature à l’automne, pour tout public.
Chez Ali Saab, j’ai retrouvé cet esprit propre à ces lieux de vie, lieux de livres plutôt magiques. Sa librairie, l’Ivraie, a ouvert en 2012 à Douarnenez.
Ali n’est pas marin pêcheur, pourtant il a commencé très tôt à partir à la pêche aux mots et à naviguer entre Paris, l’Ile de Groix et la baie de Douarnenez afin de nous nourrir de poésie et de mots doux. L’odyssée de cet ancien directeur de la photographie dans l’audiovisuel a débuté en 2000 avec la librairie l’Ecume des jours à Groix. Pendant 12 ans, Ali fait vivre avec passion et générosité cet endroit plutôt atypique dans la région. Depuis, Anne Bihan a repris l’affaire en 2012 et Ali Saad est venu poser ses filets dans la rue Voltaire de Douarnenez. De cette même année, l’Ivraie nait puis avec elle en 2014, l’association des amis de l’Ivraie.
Conférences, concerts de jazz, de blues, discussions autour d’un roman… L’Ivraie vit tous les jours des p’tits moments de partage qui nous font défaut les jours de course folle à la productivité, compétitivité et autres mots en vité (longévité… et vitalité ça marche aussi !). Pas d’inquiétude, ni de solitude chez Ali. Un café librairie est non un café littéraire, on trouve des livres pour la jeunesse, des bouquins sur la Bretagne et aussi des livres pour s’évader de Bretagne, de la photographie et des poèmes…
J’ai aussi bu une bonne bière bretonne (l’Ivraie possède la licence IV).
Une bonne discussion de comptoir avec la Jeannette, Ali n’était pas contre. Nous avons quand même parlé poésie et de son amour pour le douarneniste Georges Perros, auteur de Poèmes bleus (1962), Papiers collés (1960), Une vie ordinaire (1967) chez Gallimard. J’ai passé un très bon moment en famille.
Cet été, ce sera à la terrasse de l’Ivraie qu’on réchauffera nos âmes vagabondes. A bientôt Ali. Merci pour ton accueil.
« Qui écrit pour se sauver est foutu d’avance » (Georges Perros, Échancrures, éditions Calligrammes)
Commentaire(s) sur “L’Ivraie, graine de poésie à Douarnenez”